Le soleil, cet allié vers l’autonomie énergétique

Un site à vocation industrielle devenu une centrale de production d’énergie solaire : le destin de La Croque, caché au milieu des pins entre Rion-des-Landes et Lesperon, est révélateur des évolutions de la société et de ses priorités. Ce terrain appartenant au Département a longtemps été une base arrière pour la préparation d’enrobés routiers puis, à partir de 2002, un lieu de stockage. En 2017, le Département décide de valoriser les parcelles artificialisées pour produire de l’électricité renouvelable. Classé en friche, La Croque remplit toutes les cases. 

Comme pour tout projet d’infrastructure, le chemin entre l’idée et la mise en production a réclamé ténacité et adaptation. Après deux ans d’études environnementales, de 2018 à 2020, le permis de construire est obtenu en décembre 2021. Désireux de flécher la production vers ses sites de consommation, le Département transfère, pour des contraintes réglementaires, le projet à la Société d’économie mixte locale (SEML) Enerlandes en 2023. Celle-ci mandate l’entreprise ACTEAM ENR, spécialisée dans l’ingénierie et la construction photovoltaïque, pour une réalisation « clé en main ». Le chantier s’étend sur 6 mois, de novembre 2024 à mai 2025. « On a démontré qu’on a du bon sens, des perspectives à long terme et qu’on sait accompagner des projets dans le temps », s’est réjoui Dominique Coutière, président d’Enerlandes et vice-président du Département, lors de l’inauguration du 27 mai. 

Sur deux hectares, 3 640 panneaux ont été installés, pour une capacité de production annuelle de 2 517 Mégawattheure (MWh), soit l’équivalent de la consommation annuelle de 458 foyers, ou encore 61 % de la consommation du patrimoine du Département, hors collèges. Tous les modules sont bifaciaux, ce qui leur permet de récupérer l’énergie réfléchie par le sol, soit un gain de 5 à 15 %. Lauréate d’un appel d’offre de la Commission de régulation de l’énergie en 2023, le parc photovoltaïque La Croque bénéficie d’un contrat d’achat d’une durée de 20 ans avec l’État pour la valorisation de l’énergie produite.

Ce projet, d’un coût total de deux millions d’euros, s’est voulu écologiquement responsable du début à la fin. Cela s’est traduit par le choix d’un terrain en friche, déjà artificialisé. Sur les cinq hectares de superficie totale du site originel, seuls deux ont été dévolus à la centrale. « Cette centrale au sol ne consomme pas d’espace forestier, agricole ou naturel », a souligné Xavier Fortinon, président du Conseil départemental. 

Mené de février à avril 2024, le chantier de dépollution, d’un montant de 116 000 €, a permis d’évacuer et de recycler 1 300 tonnes de béton, 800 t d’enrobés, 42 t de déchets divers et 91 t de déchets verts. Le calendrier écologique a été respecté tout au long de la construction. Une petite mare à l’arrière du site a été renaturée. Des abris pour l’herpétofaune (lézard des murailles, couleuvre verte et jaune…) et une barrière à amphibiens ont été mis en place.

La Croque est la première centrale photovoltaïque au sol développée, construite et gérée par Enerlandes. Créée en 2008 par le Département des Landes, la société d’économie mixte locale avait jusqu’ici vocation à développer et construire des centrales photovoltaïques sur les toitures, ombrières, équipements sportifs, etc., que ce soit en accompagnement de porteurs de projets ou pour son propre compte. Elle assure ainsi l’exploitation de 93 installations solaires sur des bâtiments et des parkings publics des communes landaises. 

Le développement des centrales au sol, comme à Rion-des-Landes, est un des axes majeurs de la stratégie d’Enerlandes à l’horizon 2030. « Cinq autres projets sont dans les tuyaux, tous sur des sites déjà artificialisés », détaille Éric Gorman, directeur de la SEML : « l’un est sur un ancien site industriel pollué, l’autre sur un espace industriel encore en activité à Campet-et-Lamolère, un troisième sur un forage gazier et les deux derniers sur d’anciennes décharges ». 

Dans sa feuille de route 2030, la société d’économie mixte locale compte aussi accélérer sur son métier de base, le solaire aérien, avec un objectif annoncé de 10 000 m² sur les toitures et 40 000 m² sur les ombrières. Ainsi, elle a été retenue par la Communauté de communes MACS pour développer 12 projets sur des installations sportives.

Troisième pilier de la stratégie d’Enerlandes : la prise de participation dans des projets extérieurs. La SEML fait, par exemple, partie du tour de table du projet citoyen Candate à Saint-Paul-lès-Dax, dont la construction devrait s’achever à la fin de l’été 2026 pour une puissance de 5 Mégawatt-crête (contre 2 MWc pour La Croque). 

Pour tenir ces objectifs ambitieux et renforcer l’accompagnement des collectivités landaises, les neuf actionnaires d’Enerlandes ont ratifié une augmentation de capital d’1 million d’euros, passant de 2 184 000 € à 3 184 000 €.

Le virage pris par la SEML s’inscrit pleinement dans la Stratégie départementale de transition énergétique des Landes 2021-2030, qui vise à atteindre l’autonomie énergétique en 2033. Cet objectif s’appuie sur deux volets indissociables : la réduction de la consommation de 25 % à l’horizon 2030 et le développement des énergies renouvelables pour une couverture des besoins énergétiques à hauteur de 84 % en 2030.

Le département des Landes est en très bonne position au regard des objectifs 2030. Les énergies renouvelables couvrent 43 % de la consommation d’énergie du département, tous vecteurs confondus (gaz, pétrole, électricité, biomasse). Concernant l’électricité seule, 40 % de la consommation landaise proviennent des énergies renouvelables (chiffres 2023).

Xavier Fortinon a tenu à rappeler l’importance de l’aspect sobriété et maitrise de l’énergie, se félicitant au passage du bon exemple que donne le Conseil départemental : « on arrivera à la décarbonation en réduisant l’énergie qu’on consomme. Sur le patrimoine départemental, on a déjà réalisé 14 % d’économies sur l’énergie et 10 % sur l’électricité. On vise encore 5 % supplémentaires ».

Déplorant « les mauvais signaux envoyés par l’État » (baisse des prix de rachat dans le cadre de l'obligation d'achat, fin de l'obligation de solarisation des parkings de plus de 1500 m²., etc.), le président du Département maintient le cap : « on reste sur le projet ». Les données récentes lui donnent raison : les Landes sont devenues le premier département de France pour la production photovoltaïque.