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En mission surveillance des eaux souterraines

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Dans les Landes, l’étude et la surveillance des ressources aquifères sont assurées par le Département. Reportage avec l'équipe qui contrôle la qualité et la quantité de ces eaux essentielles.

14/11/2022

© JD
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Dans des départements montagneux, comme les Pyrénées-Atlantiques, l’eau provient souvent de captages de sources de montagne. Dans le Gers voisin, seulement un tiers du territoire renferme des nappes d’eau souterraine accessibles, en raison de l’abondance de couches géologiques argileuses imperméables. Une bonne part du captage se fait alors plutôt en surface dans les rivières et les lacs, ce qui impose des traitements et soumet plus fortement la quantité de ressource aux aléas des conditions climatiques et de la sécheresse.

Dans les Landes en revanche, comme en Gironde, l'eau potable provient en quasi-totalité des nappes souterraines (il n’existe qu’un captage en eau superficielle, dans le lac de Cazaux/Sanguinet sur la commune de Biscarrosse). Partout, elles sont donc scrutées, sondées, étudiées.

200 points de surveillance

Grâce à un maillage géographique précis du territoire, 87 points de surveillance permettent de contrôler la qualité des eaux souterraines landaises, et 91 autres stations enregistrent en continu le niveau de ces nappes, en plus d'une quarantaine de points secondaires avec des visites manuelles trois fois par an.

 

Un maillage précis du territoire © JD

Des forages peuvent faire une centaine de mètres de profondeur, d'autres une quinzaine de mètres, et les nappes réagissent complètement différemment avec un comportement propre sur l'évolution du niveau. Le sous-sol est en effet un millefeuille avec des roches réservoirs gorgées d'eau (aquifères) superposées, du jurassique au quaternaire en passant par les aquifères aquitanien et helvétien qui sont les plus utilisés pour fournir de l’eau potable ou pour l'irrigation. On a peine à imaginer les profondeurs et les déformations des couches géologiques quand on se balade sur le sol landais réputé si plat.

 

Les aquifères landais © CD40

Ce jour-là de la mi-octobre, sur la commune d'Uchacq-et-Parentis au lieu-dit Landes de Perpignan, l'équipe de la cellule hydrogéologie de la direction de l'Environnement du Département vient vérifier que les trois forages locaux fonctionnent bien. « C'est un site représentatif de nos études quantitatives des nappes. On suit leur niveau, à quelle profondeur elles sont, et comment cela évolue dans le temps, à l'année et à long terme », explique David Flandin, hydrogéologue départemental, en ouvrant le puits d'où un lézard file à toute allure à l'endroit même où gît une mue de serpent.

A l'aide d'une sonde de mesure, le chef de service s'assure que les relevés automatiques qui lui parviennent d'ordinaire directement par télégestion, sont fiables. Chaque point est visité une fois tous les deux mois environ. « Cela permet en même temps d’entretenir le site car la nature reprend vite ses droits sinon, et on en profite pour vérifier d’autres données (date, heure, batterie, tensions des piles, etc.) », précisent les deux techniciennes, Célia Degisors et Valérie Robino.

David Flandin explique la mesure quantitative d'une nappe à Uchacq-et-Parentis

Des données accessibles sur une base nationale

A 15,88 m de profondeur réelle mesurés sur place, contre 15,84 m enregistrés, un léger décalage apparaît avec la centrale locale reliée par GSM pour transmettre les données sur le serveur du Département. Ces quatre centimètres de différence « ne sont pas de nature à changer nos conclusions mais cela mérite tout de même d'être corrigé pour réétalonner le tout et retrouver des mesures tout à fait exactes dans les prochains relevés automatiques », explique David Flandin qui s'exécute aussitôt. Cette mesure-là ne sera pas utile dans l'immédiat « mais cela permet de maintenir un historique des mesures qui sert à des études robustes » puisque le service a accumulé plus de 30 ans de connaissances sur le réseau souterrain landais, socle indispensable à toute étude hydrogéologique.

Ces données publiques qui sont accessibles sur les bases nationales ADES (accès aux données sur les eaux souterraines) peuvent notamment intéresser les syndicats de gestion, des communautés des communes, l'Agence de l'eau, des bureaux d'études, des agriculteurs, des industriels ou encore des chercheurs. Il y a six mois, un universitaire américain de Californie qui travaillait sur le big data, les a même contactés pour avoir des informations sur un point perdu au fin fond de l'Armagnac landais !

L'enjeu de l'hiver pour recharger les nappes

Très régulièrement, la cellule hydrogéologie communique, en tout cas, ses mesures aux services de l’État, en particulier la DDTM (direction départementale des territoires) sur l’aspect quantitatif, notamment dans le cadre de réunions hebdomadaires organisées en période de sècheresse estivale, et l’Agence régionale de santé sur l’aspect qualité de l’eau.

« Depuis le début de l’année, le déficit pluviométrique est très marqué sur le département », selon le bulletin de situation des aquifères landais de l'automne qui relève que « la recharge des eaux souterraines n’a pas véritablement commencé » en octobre. « A cette sécheresse se sont ajoutés plusieurs épisodes caniculaires en juin, juillet et août. L’évolution piézométrique des aquifères témoigne largement de cette recharge médiocre et d’une forte sollicitation estivale. Ainsi on observe souvent une baisse progressive des niveaux tout au long de l’année, en particulier sur le Miocène et les Sables des Landes. Les niveaux enregistrés sur la partie nord de ce dernier aquifère correspondent aux plus bas mesurés depuis environ vingt ans. »

 

Un été sec va avoir finalement très peu d'impact sur les nappes profondes, un peu plus sur les nappes superficielles. Le gros enjeu est plutôt l'hiver car c'est durant cette saison que les nappes se rechargent

Citation de David Flandin (hydrogéologue départemental)

La surveillance du patrimoine aquifère est utile aussi bien pour l'irrigation que le thermalisme, l'industrie, la géothermie et bien sûr, l'eau potable. © JD

25 à 110 paramètres de qualité des eaux

Côté qualité, les mesures réalisées par les techniciens du service départemental d'hydrogéologie concernent les eaux brutes. La qualité de l'eau distribuée est, elle, gérée par les différents maîtres d’ouvrages publics chargés de la distribution comme le SYDEC. « Les eaux souterraines qu'on prélève sur des forages avant de les envoyer en laboratoire pour analyse, sont globalement de bonne qualité. C'est plus sécurisant que des eaux superficielles, car en profondeur, on évite les pollutions accidentelles par exemple, mais il peut toujours y avoir des nappes contaminées », indique Célia Degisors. A chaque prélèvement, 25 à 110 paramètres (pH, calcium, sulfates, fer, manganèse, aluminium, mercure, etc.) sont analysés, dont la liste est établie par l’Agence de l’eau.

Depuis 2001, le Département s'occupe aussi des zones sensibles identifiées comme plus vulnérables vis-à-vis des eaux souterraines, notamment par rapport aux nitrates et aux pesticides dus aux activités humaines, du côté des Barthes d’Orist, de l’Anticlinal d’Audignon, et du Bassin des Arbouts. « Cela a beaucoup évolué, ces captages (Orist, Saint-Gein et Pujo-le-Plan) ont intégré la liste nationale des captages prioritaires. Les syndicats d’eau potable et les exploitants agricoles ont dû enclencher des actions pour retrouver une ressource en eau souterraine de bonne qualité », souligne l'hydrogéologue.

Zones sensibles agricoles et études sur la côte

Au-delà de ces missions de surveillance, des études sont également réalisées par la cellule départementale. Ainsi en 2021, un forage de reconnaissance de 500 mètres a été financé par le Département (593 000€) à Mées, près de Dax, pour vérifier « l’existence et la qualité des nappes profondes et avoir une vision pour l'avenir de l 'eau potable dans le secteur ». Une série d'études (modèle informatique de nappes, mesures géophysiques, etc.) va également être lancée fin 2022 (280 000 €) pour avoir une vision à moyen et long terme des ressources en eaux souterraines du côté d'Ondres, Orist, Labenne, Angresse, Seignosse ou Soustons afin de « sécuriser l'alimentation en eau potable du secteur sud-ouest littoral landais », régulièrement tendu l'été.

 

En 2021, un forage de reconnaissance de 500 mètres a été financé par le Département (593 000€) à Mées, près de Dax. © D. Flandin

Depuis les premières mesures réalisées en 1988 à l'initiative du Conseil Général, la surveillance de ce patrimoine aquifère qui sert aussi bien à l'irrigation qu'au thermalisme, à l'industrie, à la géothermie et bien sûr à l'eau potable, est restée une compétence départementale dans les Landes. Lorsque la surveillance des aquifères s’est structurée à l’échelon national en 2000, l’Agence de l’eau Adour-Garonne s’est appuyée sur les réseaux existants et a confirmé le Conseil départemental comme maître d’ouvrage pour les Landes, vu son rôle de référent dans le domaine de la surveillance et la connaissance des eaux souterraines.

La défense d’un bien public, l’eau

« Politiquement, les nappes profondes sont un enjeu très important, nous sommes nombreux à les utiliser sans mesurer toujours l'impact que cela peut engendrer, avec des problématiques d'eau potable, de développement économique avec l'irrigation, etc. », détaille Paul Carrère, vice-président du Conseil départemental et président de l'Institution Adour : « la volonté qu'a eu le Département des Landes est aussi d'utiliser l'Institution Adour pour mettre en place une gestion des nappes profondes par le biais du schéma d’aménagement et de gestion des eaux (Sage), un outil de planification dans le domaine de l'eau, visant à concilier la préservation des ressources en eau et des milieux aquatiques et une gestion équilibrée et durable des usages (eau potable, agriculture, industrie...) », le tout en harmonisant les pratiques avec les autres départements du bassin de l’Adour (Hautes-Pyrénées, Gers et Pyrénées-Atlantiques). De quoi in fine, continuer à défendre l'accès de tous à ce bien public qu'est l'eau.

 

Le saviez-vous ?

Géologie et hydrogéologie dans les Landes

Le département où huit aquifères principaux sont exploités pour la production de l’eau potable consommée dans Les Landes, est au cœur du bassin aquitain, une structure géologique en forme de grande cuvette dans laquelle se sont accumulés des sédiments (calcaires, argiles, sables, galets…) pendant des centaines de millions d’années. Au fil de l’évolution des temps géologiques (présence de la mer plus ou moins profonde, mouvements des plaques tectoniques, surrection des Pyrénées qui a généré une grande quantité de matériaux d’érosion, etc.), l’empilement ainsi constitué atteint plusieurs milliers de mètres. Certains niveaux géologiques peuvent contenir de l’eau (aquifères), d’autres sont imperméables. La partie sud du département est généralement plus déformée, plus complexe et moins riche en réserve d’eau souterraine.

L’âge des eaux souterraines (c'est-à-dire le temps qui s’est écoulé entre l’infiltration dans le sous-sol des eaux de pluie et le prélèvement) peut être très variable : de quelques semaines pour des eaux très récentes à des milliers d’années pour des aquifères anciens. Dans tous les cas, il s’agit d’un ordre de grandeur très différent de l’âge de la roche qui contient cette eau, âge qui, lui, peut aller jusqu’à plusieurs centaines de millions d’années.

Dans un aquifère, les eaux, en mouvement, circulent très lentement, quelques mètres ou centaines de mètres par an. Si on se représente couramment les eaux souterraines comme des eaux libres du type lac ou rivière, ce n’est en fait quasiment jamais le cas, en particulier dans les Landes. La réalité d’une nappe d’eau souterraine est plus proche d’une éponge saturée d’eau.

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