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Le site départemental de l’abbaye d’Arthous et sa collection préhistorique

29/10/2025

Contribution externe

Aurélien SIMONET

88 vues

© Yoann Espiaube

Par Aurélien Simonet, archéologue au Département des Landes, Docteur en Archéologie préhistorique.

Fondée au XIIe siècle, l’abbaye d’Arthous est située en lisière du Pays Basque, sur l’un des chemins menant à Saint-Jacques-de-Compostelle. Bordée de coteaux boisés, adossée au flanc d’une colline dominant des terres régulièrement noyées des Gaves réunis, elle doit sa renommée au décor sculpté de son église dont la qualité, la composition et l’originalité ont largement contribué au classement du site au titre des monuments historiques en 1955. Son chevet présente, en effet, un riche programme iconographique : scènes bibliques et profanes, animaux réels et fantastiques, représentations de vices et châtiments, chanoines fondateurs en procession, motifs végétaux stylisés témoignent de la pensée et de l’imaginaire médiévaux.

En devenant propriétaire de l’abbaye d’Arthous en 1964, le Département des Landes a conduit une vaste opération de sauvetage et de restauration. Dix ans plus tard, un premier musée archéologique départemental a été inauguré à l’initiative du préhistorien Robert Arambourou (1914-1989). Celui-ci dirigeait depuis 1958 des fouilles archéologiques au pied de la falaise du Pastou sur la commune de Sorde-l’Abbaye, à quelques kilomètres d’Arthous qui a permis de loger les fouilleurs, d’offrir des espaces de stockage des collections et de travail ainsi que de valoriser les premiers résultats de ses fouilles et prospections au plus près de leurs lieux de découverte.

Le site départemental de l'abbaye d'Arthous © Paul Meyranx

Un site et une collection préhistoriques d’exception

La falaise du Pastou et ses abris préhistoriques sont connus depuis le XIXe siècle pour avoir livré des restes humains attribués au Magdalénien* et un ensemble unique de 55 dents d’ours et de lions, dont certaines sont percées et gravées. Les fouilles du XXe siècle ont confirmé l’importance du site où des milliers de vestiges archéologiques sont exhumés : outils en silex, restes de faune, lampes à graisse, aiguilles à chas, harpons, pointes en os de cétacé, lissoirs décorés, gravures animalières sur bois de cervidé et sur pierre… 

En 1961, deux découvertes exceptionnelles ont définitivement scellé le statut scientifique international de l’abri Duruthy, considéré aujourd’hui comme une référence pour la connaissance du Paléolithique récent* des Pyrénées : un second ensemble de restes humains magdaléniens ainsi que trois exceptionnelles sculptures en ronde-bosse représentant des chevaux. 

En 1979, le Département des Landes s’est porté acquéreur d’une partie de ces collections, constituée d’environ 20 000 pièces préhistoriques, qu’il s’attache depuis à conserver, à étudier et à valoriser.

Collections préhistoriques de l'abbaye d'Arthous : sculpture de cheval en grès et renne gravé sur os © Aurélien Simonet

Trois chefs-d’œuvre magdaléniens

En grès, en calcaire marneux ou en ivoire de mammouth, les trois sculptures de chevaux, attribuées au Magdalénien moyen et datées d’environ 17 000 cal. BP*, représentent deux têtes de chevaux, tandis que la troisième figure la totalité de l’animal avec les membres antérieurs et postérieurs repliés sous le ventre. Longue de plus de 26 cm, cette statuette communément nommée le « Cheval agenouillé » est la plus grande sculpture magdalénienne actuellement connue. La tête de cheval réalisée à partir d’un bloc de calcaire possède une perforation dont l’usure traduit une probable utilisation comme pendentif. La dernière sculpture, réalisée dans une défense de mammouth, se caractérise par une grande finesse et une géométrisation des formes.

Les fouilles de Robert Arambourou, particulièrement rigoureuses pour l’époque, ont documenté le contexte de découverte de ces trois sculptures, dans un espace restreint et associées à une douzaine de mandibules de chevaux âgés portant des traces de décarnisation voire des décors. Le Cheval agenouillé reposait sur 6 fragments de mâchoire. Deux d’entre elles, superposées, formaient une sorte de coffret à l’intérieur duquel se trouvaient deux prémolaires de loup percées et un « couteau » en pierre. Ce dépôt particulier, qui associe fragments et images de cheval, est unique en Europe occidentale. Il illustre l’importance de cet animal pour les Magdaléniens, sa valeur de symbole et sa place dans le cadre de rituels.

Le saviez-vous ?

Le site départemental de l’abbaye d’Arthous a prêté 8 fac-similés d’œuvres d’art paléolithiques au PARCC, le centre d’art contemporain de Labenne. Ils sont exposés sur des fonds colorés conçus par le peintre Romain Bernini dans le cadre de l’exposition temporaire Contacts. Présentée du 20 septembre 2025 au 4 janvier 2026, elle explore les relations entre l’humain, l’animal et le sauvage.

Exposition temporaire « Contacts » au PARCC de Labenne © Aurélien Simonet

Une collection « Musée de France »

Revêtant un intérêt public majeur pour la connaissance de l’histoire de l’humanité, ces collections préhistoriques sont inscrites à l’inventaire des « Musées de France » qui leur confère, outre le statut de trésor national, une protection juridique empêchant leur aliénation ou disparition, et garantit leur transmission aux générations futures.

Depuis la reconfiguration en 2003 d’un musée départemental d’histoire et d’archéologie au sein de l’abbaye d’Arthous, le Département des Landes est engagé dans une démarche visant à améliorer leur connaissance et leur valorisation.

Ainsi, après l’inauguration en 2020 d’une Salle des trésors dédiée aux sculptures de chevaux, le Département des Landes a contractualisé plusieurs collaborations scientifiques au sein de programmes de recherche internationaux portés par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’Université Toulouse-Jean Jaurès, le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) ou encore l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), pour l’étude scientifique des vestiges de chevaux, de poissons et de cétacés présents dans ses collections. 

Moulage intégré à une peinture dans l'exposition « Contacts » au PARCC © Aurélien Simonet

Conscient de l’intérêt artistique et scientifique de ce fonds patrimonial exceptionnel, le Département des Landes œuvre à rendre ces collections accessibles aux publics et en premier lieu aux plus proches habitants. Leur présentation dans une exposition organisée par le nouveau pôle culturel de MACS permet de tisser des liens avec le territoire et de faire dialoguer le patrimoine avec l’art contemporain. Car si l’art préhistorique inspire les artistes, ces derniers, en retour, peuvent nous aider à capter l’esprit des vestiges qui nous sont parvenus et établir une connexion intime avec ces sociétés si lointaines et si énigmatiques de la Préhistoire.

Glossaire

BP : en anglais abrégé de before present, « avant le présent ». En préhistoire, les datations sont exprimées en nombre d’années comptées vers le passé à partir du présent. Le présent est fixé par convention à l’année 1950. Cette date a été choisie comme année de référence parce qu’elle correspond aux premiers essais de datation par le carbone 14. Les datations brutes obtenues demandent des corrections appelées calibrage. Une date calibrée est désignée par la mention cal BP.

Paléolithique récent : subdivision tardive de la Préhistoire qui regroupe des sociétés très diverses de chasseurs-cueilleurs nomades entre 42 000 et 12 000 ans avant le présent. Cette période est caractérisée par l'expansion de l'Homme anatomiquement moderne à travers le monde et s’achève avec la fin de la dernière période glaciaire. 

Magdalénien : de l’abri de La Madeleine en Dordogne. Le Magdalénien est une phase du Paléolithique récent datée entre 21 000 et 14 000 ans avant le présent et se retrouve uniquement en Europe de l’Ouest. C’est la période du Paléolithique récent où les grottes ornées et les œuvres d’art mobilier sont les plus nombreuses et diversifiées. L’industrie osseuse est d’une richesse inédite et le bois de renne est particulièrement travaillé pour confectionner des sagaies et des harpons. Le débitage laminaire du silex peut être impressionnant comme celui d’Étiolles (Essonne). 

 

Pour en savoir plus :

Simonet A., 2020 – Le trésor préhistorique de l’abbaye d’Arthous, Bordeaux, Le Festin, no 113, p. 78-85.

Remerciements : tous mes remerciements s’adressent à Evelyne Zacharie pour sa relecture et ses corrections.

 

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